L’amitié n’a rien d’une passion déboussolante. On n’a pas de coup de foudre pour un ami: on se lie délibérément, lentement, par consensus. Avec l’ami on partage, on conjugue deux esprits. À cela les amoureux ajoutent quelques désirs moins spirituels pour s’aimer "corps et âme": il ne s’agit plus de seulement se toucher le cœur, mais de faire l’amour. Cela modifie le rapport: on réclame non plus seulement la présence, mais le contact de l’autre. Le désir (pour ne pas parler de pulsion, de tendance, voire d’instinct qui nous ramèneraient au rang de nos amies les bêtes) rappelle aux amoureux qu’ils ont des corps, ce qui les sort du monde amical, où en partageant de simples idées ils pouvaient encore prétendre n’être que des “choses qui pensent”.